Alexiane Le Roy
Irrémédiablement attirée vers la fragilité des choses, je perçois toujours la faille dans le rigide, l’instabilité dans l’équilibre. Si la blessure n’existe pas, je la provoque. J’effectue des analogies entre le corps et l’architecture qui proviennent d’un constat : on répare le corps comme on construit nos bâtiments. Ils s’inspirent mutuellement et évoluent ensemble. Des associations de plus en plus évidentes entre dispositifs médicaux et architecturaux mis en place pour raccommoder se sont imposées à moi. Des recherches et des expériences, alimentées par un rapport étroit avec la médecine, constituent mon vocabulaire plastique hybride entre ces deux domaines. Le chirurgien qui a sculpté ma cheville fracturée, agrémentée de vis et de plaques d’acier, a renforcé ce désir de lier réparation et soin. Sensible aux matériaux de construction, je suis touchée par la faillibilité qu’ils peuvent dégager, qui me renvoie à notre propre faiblesse. Je m’approprie ces matériaux, teste leurs limites. Leurs propriétés sont poussées à leur paroxysme, jusqu’à, parfois, atteindre la rupture. La rencontre de mon corps avec ces matériaux est simultanément intimité et rapport de force. De cette rencontre découlent un certain nombre d’actions, un processus qui se retrouve parfois signifié dans la restitution finale. Pas tant dans la technique, je suis plutôt attachée à des gestes. J’aime me faire surprendre par les matériaux qui composent mes pièces, leur caractère aléatoire leur attribue une vitalité poétiquement déconcertante.
A Le Roy