Edmée LAURIN
C’est à travers les gestes de couler, d’imprimer dans la matière que je tente de faire se rejoindre plastiquement les notions d’identités et de temps. En versant et en appliquant des matériaux qui se transforment, dont l’état passe du liquide au solide, je donne corps aux gestes que je fais, saisissant les poses dans leur élan.
Bien que le corps ne soit jamais montré que par fragment ou par évocations délicates, il transpire de toutes mes productions : un sein qui émerge à différents stades d’une pierre de porcelaine, des genoux agglomérés entre eux, les gouttelettes immaculées en émail qui exsudent d’une céramique sombre, un matelas d’appoint en mousse patiemment stratifié à la résine. Ces différents fragments, tous parties d’un ensemble à la fois mis à mal mais mieux compris du fait de sa dislocation, donnent à observer ces codes, symboles et mythes en déconstruction qui nous accompagnent.
Mes pièces montrent la nécessité de figer quelque chose pour en comprendre la fluidité et redonnent leur autorité à certains objets oubliés de mon quotidien. Développer le champs lexical archéologique de mon propre travail me permet de voir mes œuvres comme de futures fossiles, placés sur un terrain à fouiller. Je pratique la répétition des formes au travers de différents processus de moulage, et envisage mes séries de pièces comme les déclinaisons de mêmes séquences, des « copies naturelles » jamais identiques mais partageant un même génome, objets qui portent la trace d’un futur passé, ou encore objet qui ravive un passé en oubli.
